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Pourquoi ne lui a-t-elle rien dit ? Elle avait peur de lui, peut-être ?

Affolé par cette supposition monstrueuse, il se prend la tête à deux mains et il crie dans le silence : Je l’aimais ! je l’aimais ! Tout son être le crie dans une révolte éperdue contre la mort, contre l’irrévocable séparation qui fait que jamais, jamais il ne pourra lui prouver son amour autrement et mieux qu’il ne l’a fait.

Sa détresse grandit : son inconsciente et involontaire erreur prend des proportions exagérées : impitoyable et injuste pour lui-même, il se rappelle ses impatiences, ses brusqueries, son insouciance quand elle était lasse, ses moqueries devant ce que, dans sa force d’homme fort, il appelait des frayeurs puériles !

Il a oublié tant d’attentions, de délicatesses et de bons soins qu’il lui prodigua, il ne se souvient pas de la lueur heureuse que sa seule présence mettait dans les grands yeux limpides… et rien, rien ne le défend contre les remords qui roulent dans son âme comme des vagues de tempête.

Oh ! l’avoir là, près de lui, et l’aimer plus encore pour cette faiblesse dont il n’eut pas assez pitié.

Sa douleur monte des profondeurs de son être et le jette dans un abîme de désolation où il est perdu et si effroyablement seul !

Ô non ! Ils ne peuvent pas revenir, les morts ! Autrement l’âme tendre et douce de