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ronflait sourdement, et où le chien et le chat, se sentant tout à fait chez eux, nous recevaient avec toutes leurs marques spéciales de parfaite cordialité. Sur la longue table recouverte de toile cirée s’empilaient de bons tricots de laine du pays, de moelleuses couvertes, des couvre-pieds à petits losanges d’indienne, d’autres, faits de belle catalogne blanche, des mitaines, des « crémones », des casquettes, des foulards et des hardes de toutes descriptions lavées, reprisées, repassées, le tout représentant un travail consciencieux et persévérant.

L’animation et la gaieté ne tardèrent pas à emplir la salle de jolis gestes et de bons éclats de rire : on se taquinait, on potinait gentiment… une demoiselle qui a évidemment cessé de rêver au bonheur à deux, m’explique que c’est commode d’avoir les réunions chez ma voisine qui n’a « ni enfants, ni mari… aucun embarras ! » conclut-elle catégoriquement. Personne ne se scandalise et sa boutade passe comme une lettre à la poste.

Une grande corbeille remplie de belles pommes fameuses circule parmi les couturières qui les mordent à belles dents sans pour cela perdre un coup de langue, et jamais vous n’avez vu plus d’activité ! Les unes taillent, les autres cousent et tricotent et dans un coin, tout près du poêle, la vieille sœur de ma voisine file au rouet, comme au bon vieux temps, de la laine fine et blanche comme la neige qui continue à tomber dehors.