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être méchants. Ah ! ne laissons pas dormir la « petite âme » dont je vous parlais l’autre jour, alors que s’agitent nos sept autres âmes qui font mille embarras et lient si bien nos volontés et nos bonnes volontés.

Vous vous souvenez du géant Gulliver, immobilisé par les nains minuscules qui courent sur ses bras, sa poitrine, ses jambes, et sa tête, en l’entourant de liens si fins qu’on les voit à peine, et si solides, que le géant devient prisonnier de ces diablotins.

Nos sept âmes, remplies de forces mauvaises font auprès de nous la même besogne, quand notre « petite âme » rêve au lieu de penser, de vouloir, d’aimer et d’agir. Ce sommeil est le péché des braves et honnêtes gens qui respectent la loi et ne vivent que matériellement. Ils ne font pas de grandes fautes ; ils en font une infinité de petites qu’ils n’effacent jamais, faute de les voir : elles finissent par former une couche épaisse qui ternit le cristal de leur âme, empêche toute lumière d’y tomber et tout rayonnement réflexe d’en sortir.


XLII

Souvenir


Le soir tombe tôt en septembre, et déjà le riant aspect des montagnes s’est transformé : elles se profilent menaçantes et noires sur le ciel un peu couvert, et dans le fleuve que