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elle ne se plaint jamais et me prend en pitié, moi, quand je viens au soleil !

— Vous devez vous ennuyer, pauvre madame Novelle, toujours seule, sans autre chose à faire que de dire votre chapelet ? — Primo, ça m’ennuie pas de dire mon chapelet, pi, faut pas crère que j’suis si seule que ça ! — J’ouvre des yeux curieux. — Écoutez, c’est un secret, mais vous êtes bonne pour moë et j’vas vous le dire. J’ai perdu, dans le temps, un beau petit gas de quatre ans. Vous n’avez jamais vu de si beau et de si fin… et la preuve, c’est que depuis que je peux pu grouiller, y vient, là, tous les jours, su l’pied du litte, et y m’raconte ben des nouvelles et des histoëres du paradis : comme y est ben, comme c’est beau, qu’y m’attendra à la porte pour me mener au père Éternel, pi qu’y me recommandera comme ane bonne mère… Non, j’m’ennuie jamais ! — Et ses pauvres yeux éteints souriaient.

Cela m’a reposée des chapeaux, des toquets et des toquées.


XXXIX

La guerre


La terrible nouvelle nous attriste tous. La guerre est déclarée, et là-bas, « chez nous », en France, on a commencé à se battre. Je ne saurais vous parler d’autre chose, nous