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cristie : « et ce que j’me suis fait ramasser par M. le curé pour c’te porte pas fermée ! Il voulait rien entendre et après m’avoir bien disputé, il riait de mes imaginations, qu’il appelait ça. »

Bien entendu que, sauf le curé incrédule, personne ne doutait de la vérité de cette apparition : c’était évidemment l’ancien curé qui demandait des prières ! Pour eux les visions sont choses ordinaires dont personne ne s’étonne. Quand on est mort et enterré, on revient c’est ainsi, et ceux qui le nient auraient besoin d’une bonne petite apparition pour les remettre dans la vérité.

Lequel d’entre ces crédules n’a pas vu ses défunts revenir en blancheur indécise, en flamme phosphorescente au pied du lit, en ombres sur le miroir quand les lueurs du poêle sont éteintes et que les tisons deviennent gris dans les cendres ?…

Les âmes simples ont le don poétique par excellence et à nous inconnu, qui est de croire à leur propre poésie. Aussi créent-elles sans cesse de nouvelles légendes. Comment ? Comme les anciennes ont été créées, d’une manière inconsciente et naïve, comme on se rappelle et comme on oublie. On se fait des fantômes avec des réalités.

Et tous tant que nous sommes nous leur ressemblons. Quand le temps a passé son estompe sur les contours atténués de leurs images, les êtres et les événements du passé