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près de l’autel et c’est toute la sacristie : il contient les vases et les vêtements sacrés. Nous avons tout visité : la laiterie et les greniers superposés où dorment de vieux coffres de bois, des huches à pain, des chandeliers de cuivre, des dévidoirs de formes diverses et plusieurs rouets.

Des fenêtres des mansardes nous apercevions le fleuve qui roulait ses blocs de glace et, plus loin, l’île donnée aux religieuses par monsieur Le Ber, père de la recluse… et pendant quelques instants nous nous sommes cru très loin de l’agitation de la ville et du vacarme du progrès.

Un bon chien noir et un chat familier nous suivaient, accentuant le caractère d’intimité qu’a conservée la vieille demeure claire et charmante dont je garde un souvenir ravi.


XXIV

La lutte


Dans le froid cruel qui noircissait les bourgeons tendres et tuait les petits oiseaux transis, nous avions dans l’âme toute l’angoisse du printemps brutalement repoussé par le brutal l’hiver, c’était l’angoisse des beaux sentiments déçus, l’angoisse des âmes qui accueillent la vie avec confiance, en l’aimant pour sa beauté, sans soupçonner sa dureté, et qui tout à coup sont frappés par elle. Et nous regardions tristement, par la