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pas le sou, et à qui la charité la plus exquise fournit la meilleure joie du monde : celle de donner, de faire l’aumône.

Parmi ces vieux et ces idiots, toutes les religieuses, novices, postulantes, circulent, douces et souriantes et l’on se sent heureuse, avec des larmes aux yeux, dans cette atmosphère bénie où la Bonté toujours active fait des miracles dans le mystère que si peu pénètrent. Il faut voir pour comprendre l’abnégation et la patience des religieuses qui soignent ces déchets de l’humanité et s’en font aimer.


XXII

Les pauvres vieux


Le crépuscule triste descend sur la nature accablée sous le silence et la pluie : l’ombre grise s’allonge sur les chemins boueux et enveloppe les arbres où de minces bourgeons frissonnent. La vieille Millard sert son tricot autour de ses épaules voûtées : près de son poêle tiède, elle grelotte. Attentive aux bruits de dehors, elle n’entend que le gémissement du vent et le glissement monotone de la pluie sur les vitres. Son vieux est parti le matin pour assister aux funérailles de sa sœur, grosse dame riche de la ville, qui les a dédaignés de son vivant, mais qui a peut-être pensé à eux à l’heure de la mort ? Tout