Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, cinquième série, 1922.djvu/54

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que nous aimions la mort ? Et beaucoup de mourants la désirent et l’appellent. Je ne puis détacher mes yeux de ce petit tas de cendres : le meilleur de deux âmes a rempli les feuilles que le feu a anéanties, c’était le lien visible et palpable entre deux cœurs dont l’un était l’écho et le reflet de l’autre ; la flamme a détruit l’expression du sentiment, mais rien au monde ne peut faire disparaître le sentiment vivant qui s’attache aux profondeurs d’une âme humaine ! C’est la consolation des séparations cruelles et comme la signature divine des affections impérissables.

Afin de ne pas arriver comme des pauvres de l’autre côté où nous attend notre Seigneur, cultivons les affections, les pensées, les sentiments que Dieu peut signer, et nous lui tendrons toute notre âme faible, aimante et douloureuse, mais tellement sienne qu'Il la reconnaîtra en souriant.


XVIII

Pendant qu’elle rêve


Dans le ciel d’hiver d’un azur délicat, les nuages qui n’habitent nulle part, se forment et disparaissent comme les rêves de la jeune fille qui brode , assise à la croisée de la grande salle, basse de plafond, meublée avec une simplicité vieillotte et sévère assez rare par ce temps de luxe plus ou moins criard.