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La Chaîne


Pendant toute l’année, nous avons marché sur le vieux chemin connu, reprenant chaque matin la tâche quotidienne, déposant le soir les mêmes fardeaux, et de saison en saison, quelquefois las, quelquefois tristes, nous regardions pourtant les jours monotones, s’enfuir trop rapidement. Maintenant, aux dernières heures de l’année, nous nous retrouvons avec les mêmes sentiments contradictoires : lassitude de ce que nous connaissons, appréhension du mystère de demain, et je me demande s’il n’y a pas plus de tristesse que de joie dans les souhaits de bonheur que nos amis nous adressent avec tant d’entrain ?

C’est, au fond, que ni les uns, ni les autres ne croyons à la réalisation des vœux qui voltigent dans l’air par ce temps des fêtes ; nous serions désappointés tout de même, si nos amis négligeaient de nous les faire et nous sentons le besoin de dire à ceux que nous aimons notre espoir que l’année nouvelle leur soit douce.

Cette tristesse du « Jour de l’an » éprouvée par un si grand nombre est naturelle : chaque année, les aimés se font plus rares au rendez-vous familial, et après avoir compté les absents, les larmes empêchent parfois de voir