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chambre était payé, qu’elle avait mangé à peu près à sa faim trois fois par jour, il lui restait juste de quoi se vêtir bien modestement.

La bonne femme était très charitable et elle rognait sur la nourriture et sur le vêtement pour donner aux plus pauvres qu’elle. Elle était pieuse, simple, d’une crédulité naïve renversante et, je l’ai dit plus haut, elle causait volontiers.

C’est dans ses moments d’expansion qu’elle confiait à ceux qui s’intéressaient à elle qu’elle aurait trouvé à se marier dans le temps, mais qu’elle n’avait pas « ça dans le goût, la reproduction. »

Ce manque de vocation ne l’empêchait pas d’adorer les enfants, comme vous voyez !

Cette année, elle ruminait depuis six mois le projet de faire une fête de Noël de sa façon à ses chers gamins pauvres. Elle s’était privée de nourriture, elle n’avait pas remplacé sa vieille robe rapiécée et verdâtre ; son feutre, bossé et défraîchi, n’avait plus de garniture, mais la bonne Mélanie, sou à sou, avait amassé quatre belles piastres qui gonflaient sa bourse peu habituée à tant de richesses.

— Le vingt-quatre décembre elle n’alla pas travailler, et ses allées et venues entre la rue commerciale et la Salle des Habitants éveillèrent bien des curiosités, entr’autres celle de la nièce du curé, fillette de quinze ans, fine et espiègle qui aurait bien voulu