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Voilà que mes pensées deviennent vagues : c’est que, pendant que j’écris, un air de Schumann m’arrive du salon, assourdi et triste ! Dans la maison silencieuse, on n’entend que ce chant inquiet et ma plume qui court. Les notes familières peuplent ma solitude d’êtres aimés qui les ont entendues avec moi, et tous les regrets de ma vie remontent des profondeurs de l’âme, là où habitent, silencieuses, toutes les tristesses. Perçant l’obscurité, traversant les vitres ruisselantes, les glas de huit heures entrent, laissent tomber lourdement, un à un, leurs appels de détresse, et c’est à genoux que je veux m’approcher de ceux qui m’appellent. Ma prière les fait tout près : pour un moment, elle me les rend. Chères âmes, c’est votre mois ! Que j’aime l’expression anglaise, « Mois des âmes, » mieux que la nôtre : « Mois des morts, » puisque justement ils ne vivent qu’avec leurs âmes éclairées, affranchies de tout ce qui nous empêche, nous, de comprendre et d’être meilleurs !


XLIX

Cœurs Fidèles


L’exquise douceur de ces derniers jours d’octobre distille une tristesse infinie, il y entre le souvenir de la désolation de l’automne dernier avec ses processions de cercueils sur les chemins boueux, sous le ciel ruisse-