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Il y a là les cinq ou six amies de la dame, toujours informées authentiquement de ce qui se passe et de ce qui va arriver. Elles se communiquent les nouvelles sous le sceau du plus strict secret, et à peine séparées, elles les jettent allègrement aux quatre vents. Elles sont en effervescence, car la locataire de Buisson est séparée de son mari, paraît il, elle a de l’argent… on sait ce que ça veut dire quand une femme vit seule, qu’elle est jolie et jeune… il serait prudent de s’abstenir de la voir, pour le moment, conclut la femme du notaire, une majestueuse dinde du cercle intime.

Quinze jours après, c’est bien une autre histoire ! L’étrangère loge un monsieur chez elle ! Il est arrivé l’après-midi de mardi, et depuis, on ne les voit ni l’un, ni l’autre ! Quel scandale ! Ne devrait-on pas prévenir le Curé, et le propriétaire… car ce dernier est un homme respectable, et de la ville voisine il ne soupçonne pas ce qui se passe ici !

Les yeux roulent, effarés les plus austères lèvent les bras au ciel pour mieux témoigner leur indignation. — Mais, risque une femme plus calme et plus charitable que les autres, cet homme est peut-être son frère ? — Son frère ? Naïve que vous êtes ! Et ces allures mystérieuses… et ce que l’on raconte sur le compte de… cette personne ! — Qui le raconte ? D’où viennent ces renseignements ? Moi je l’ai rencontrée sur la rue, cette jeune femme, elle paraît très bien : modeste, distinguée, et