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l’église, mais la grand’côte est à pic et il fallut du temps pour se rendre. On entre dans la tour des cloches et on trouve le pauvre Gapit pendu à une des cordes et déjà tout bleu. On le détache, on court chercher le curé qui l’extrémise et qui a le temps de lui ouvrir la p’tite porte du paradis où il ne serait jamais entré s’il était mort dans son désespoir. « Ça, c’est trop de chagrin, rien que pour une créature ! » conclut le vieux, dédaigneusement, en crachant avec énergie.


XLIV

Le mal de la ville


Dans le village pittoresque que je traverse au moins une fois par jour, voilà qu’en ouvrant bien les yeux pour voir ce qu’il s’y passe, je suis prise de l’envie de moraliser. — « Ce n’est pas nouveau ! » grognent les critiques. Hélas ! ils ont raison, mais peut-être, s’ils me lisent encore cette fois, me donneront-ils raison !

Il n’était que neuf heures, ce matin, quand je vis, balayant le seuil de sa porte, une jeune fille, qui, après avoir passé l’hiver en service à Montréal, est revenue ici pour épater son monde ! Poudrée comme une souris échappée d’un sac à farine, les cheveux en broussailles et en oreilles de chien, elle a des souliers pointus et haut perchés, des bas d’un blanc douteux, une blouse russe de crêpe de Chine