Page:Dessaulles - La Grande Guerre ecclésiastique. La Comédie infernale et les noces d’or. La suprématie ecclésiastique sur l’ordre temporel, 1873.djvu/59

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 49 —

nouveauté mot terrifiant qui a toujours donné la chair de poule à toute la sainte curie. Grégoire XVI détestait les nouveautés au point de ne vouloir pas entendre parler d’introduire les chemins de fer dans l’état pontifical, si dénué d’industrie, et où le commerce était aussi systématiquement entravé que l’agriculture. Et ceux qui détestaient ainsi tout progrès industriel, détestaient encore bien davantage tout progrès intellectuel.

Défense d’importer des livres !

Défense d’en publier sans l’imprimatur du censeur, toujours choisi parmi les plus rétrogrades ! Les Évêques eux-mêmes, pendant le Concile, ne peuvent faire imprimer leurs observations sur les changemems proposés à l’antique foi de l’Église !

Défense de recevoir les journaux étrangers !

Défense de voyager à l’étranger sans permission !

Défense d’envoyer ses enfants recevoir leur éducation dans un autre pays !

Défense de parler du gouvernement, même dans la famille, à moins qu’on ne le proclamât le meilleur de la terre !

Défense (dans les universités) d’étudier l’histoire dans d’autres livres que ceux autorisés par la Censure ; et l’on sait ce que la censure romaine faisait de l’histoire !

Défense à un chrétien de converser en public avec un juif !

Défense aux juifs d’être propriétaires, ou d’exercer une profession ou un métier, ou de cultiver la terre !

Défenses arbitraires d’exporter les grains ou les bestiaux ! Spéculations énormes des quatre frères Antonelli ! (le Cardinal compris) par suite de ces prohibitions !

Défense de vendre l’huile ailleurs qu’à l’Annone ! (grenier d’abondance.)

Défense de fabriquer nombre d’articles de consommation parceque quelques privilégiés en avaient le monopole !

Défenses aux corps municipaux de présenter des adresses au Pape pour lui exposer les besoins du pays !

Défense aux médecins de soigner les malades qui ne se confessaient pas dès le jour de leur maladie !

Enlèvement des enfants à leurs parents sous prétexte de religion.

Obligation pour les citoyens de montrer leur billet de communion aux desservants chaque fois qu’ils en étaient requis ! Donc des milliers de communions indignes pour éviter de voir afficher publiquement son nom, ou d’être soumis aux tracasseries de la police qui, par exemple, fermait chrétiennement les yeux sur la vente presque publique des faux billets de confession jusque dans les cafés !  !

Obligation de dénoncer ses propres parents à l’autorité s’ils manquaient souvent les offices, s’ils faisaient gras le vendredi, s’ils avaient un livre défendu, — lisez : qui touchât à la politique, car les livres obscènes circulaient beaucoup, — s’ils tenaient des discours séditieux, s’ils appartenaient à une société secrète !

Souveraineté de la police ! Arrestation sans mandat des citoyens sous les plus futiles prétextes ! Et ils pourrissaient en prison sans pouvoir connaître pourquoi ils y avaient été mis !

Et puis secret et ténèbres partout !

Secret de la procédure judiciaire !

Secret des noms des dénonciateurs et encouragement systématique de cette illustre classe !

Secret des noms des témoins !

L’accusé ne pouvant choisir son défenseur qui lui était imposé d’office !

Secret même des sentences judiciaires qui n’étaient presque jamais prononcées en public !

Mais par exemple point de secret des lettres ! Ce qui aurait dû être public restait secret, mais ce qui aurait dû rester secret, la correspondance privée, était constamment violé. Les Évêques de l’opposition, au Concile, étaient obligés de confier leurs lettres à l’abominable gouvernement italien qui, tout excommunié qu’il fût, prenait ces lettres à la frontière et les respectait ! C’étaient des Évêques, Mgr, qui n’osaient pas livrer leur correspondance aux irréprochables employés des saintes congrégations !  !

Enfin vénalité des Juges !