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Session du Parlement de la Province de Québec, soit amendé ou révoqué, pour les raisons qu’il se permet de leur exposer, avec la pleine confiance que toute justice lui sera rendue.

» Cet ordre ne permet pas en effet à ceux qui sont autorisés par leur Évêque à baptiser, marier et inhumer de prendre les titres qui leur sont conférés par leurs lettres d’institution.

» Or c’est là une chose dont il est difficile de se rendre raison, parce que c’est chose reçue, dans tous les états et conditions de la société, de désigner chacun par le titre qui l’honore et qui indique les devoirs qu’il a à remplir envers ses semblables. Mais c’est surtout quand il s’agit de quelques personnages autorisés à faire des actes publics auxquels s’attache une grande responsabilité, que l’on serait inexcusable, aux yeux de la loi, de négliger de donner ou de prendre les titres qui leur sont propres.

» Ainsi, en prenant pour exemple les actes de baptême, mariage et sépulture qui doivent se consigner dans les régîtres de l’État Civil, n’est-il pas requis de mentionner le titre, la profession de ceux qui comparaissent dans ces actes ? Ne faut-il pas signifier l’état, la profession, le titre d’un père qui présente son enfant au baptême, d’un époux qui prend une épouse ? Toute omission à cet égard n’exigerait-elle pas l’intervention judiciaire pour la faire réparer ?

» Mais s’il en est ainsi pour les particuliers, qui figurent dans ces Actes, pourrait-on croire que ceux à qui est confié le soin de les faire, et qui en doivent avoir toute la responsabilité aux yeux de l’Église et de l’État, pourraient apparaître dans ces Actes comme de simples particuliers et sans prendre les titres qui leur donnent droit de remplir le ministère qu’ils exercent ? Pourrait-on croire surtout qu’il ne leur serait pas permis de se présenter eux-mêmes avec ces titres ? Ou s’ils les prennent, ne pourrait-on pas leur reprocher de se mettre en contradiction avec les livres authentiques qu’ils ont entre les mains ? Ne suffirait-il pas pour cela de rapprocher leur signature avec l’En-tête de ces livres ?

» Et en effet, comment sont-ils désignés dans cet En-tête ou Intitulé ? Comme de simples prêtres, chargés de présenter ces régîtres aux Protonotaires ou aux Juges. Ils devront formuler les Actes de ces régîtres, déclarés authentiques par l’autorité civile, comme des commis ou des secrétaires chez qui on ne reconnaît aucune capacité officielle, aucun titre public.

» Cet ordre ne semble t-il donc pas injurieux au prêtre à qui néanmoins est confié le soin de pourvoir, par des actes faits en bonne et due forme, aux intérêts des familles. Cette injure paraîtrait d’autant plus frappante qu’il est le seul que l’on prive ainsi du droit qu’il a d’être reconnu avec le titre qui lui est dûment conféré. Car il est bien connu que les ministres des diverses dénominations religieuses sont admis à l’octroi des régîtres avec les titres d’honneur ou de dignité qu’ils assument, sans que l’autorité civile ait jamais cru devoir y voir. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un coup d’œil sur leurs régîtres déposés au Greffe.

» Il est à remarquer maintenant que cet Ordre paraît d’autant plus extraordinaire qu’il ne saurait se justifier par la loi qu’il est censé mettre en pratique. Il y est en effet statué que ceux qui sont autorisés par leur Évêque à faire des baptêmes, mariages et sépultures, ont droit de tenir des régîtres de l’État Civil. Il leur suffit pour prouver ce droit d’exhiber leur lettres d’institution. Or, ces lettres d’institution leur confèrent des titres en vertu desquels seuls ils peuvent exercer ces fonctions ; si ces titres leur étaient ôtés, ils cesseraient d’avoir le pouvoir de les remplir et par conséquent d’avoir droit aux régîtres. Il est donc nécessaire que l’autorité civile reconnaisse les titres d’où découle le pouvoir de faire des baptêmes, mariages et sépultures, pour constater chez ceux qui remplissent ces fonctions le droit aux régîtres. Autrement on pourrait séparer le titre de Juge et le droit de ju-