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expression libre de la pensée humaine ; — il laissait un État fort et indépendant pour passer à l’obédience d’un prince encore mineur, circonvenu par des influences redoutables, et qui n’avait ni la puissance politique, ni la force d’esprit nécessaires pour tenir tête soit à la Cour de Rome, soit au pouvoir occulte de l’Inquisition, et néanmoins, en dépit de toutes ces raisons, que ses amis firent valoir de leur mieux, il commit la faute irréparable de retourner à Florence sur l’invitation que lui en fit le Grand-Duc, qui le nomma son premier mathématicien, mais avec un traitement inférieur à celui dont il jouissait à Padoue. Telle a été la source de tous ses malheurs. Pourtant nous n’en sommes pas encore arrivés à l’époque des persécutions qu’il eut à subir pour avoir eu, en quelque sorte, plus de génie que n’en comportait son siècle.

En 1611, à la sollicitation de plusieurs personnages éminents employés dans les plus hautes charges de l’Église, il se rendit à Rome et fit voir à tout le monde les remarquables nouveautés qu’il avait observées dans le Ciel. Presque tous les cardinaux s’empressèrent d’aller lui témoigner leur admiration et de jouir, au moyen du télescope, de la vue des corps célestes dont l’augmentation de volume, produite par l’instrument, les jetait dans le dernier étonnement. À Rome comme à Venise la sensation fut immense, et Galilée retourna en Toscane couvert de gloire. Néanmoins les Péripatéticiens étaient à l’œuvre, et prétendaient toujours que les cieux étant incorruptibles, suivant l’expression d’Aristote, Galilée ne pouvait y trouver des changements ou des modifications à ce que la simple vue avait toujours permis d’y découvrir. Pour cette école, c’était une croyance inflexible que les astres se montraient à nos yeux tels qu’ils sont véritablement.

On est peiné de voir que le premier personnage important, qui ait jeté le cri d’alarme à propos des découvertes de Galilée soit le grand orateur et le grand publiciste des Jésuites, le cardinal Bellarmin. Il adressa plusieurs questions à ce sujet à l’astromone Clavius et à trois autres pères de la Compagnie de Jésus, qui, dans une réponse en date du 24 avril 1611, admirent quelques unes de ces découvertes comme vraies, tout en gardant le silence sur ce qui leur paraissait trop opposé aux préjugés de l’époque, dans les théories et les démonstrations de Galilée.