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Ce que je dis ici à V. Ém. est honnêtement et franchement la vérité, que Mgr. de Montréal ne lui a jamais donnée complète, trompé peut-être lui-même par les flatteurs qui l’entourent, et qui espèrent faire plus facilement leur chemin sous la protection du clergé en montrant des sentiments qu’ils n’ont pas dans le cœur. Leur conduite privée ne nous concerne pas sans doute, mais ce qui nous regarde certainement, ce sont leurs attaques malveillantes, passionnées ou calomnieuses, faites par pure hypocrisie et pour se faire bien venir d’un corps puissant. Et nous avons incontestablement le droit, pour faire mieux juger de ces attaques, de montrer ce que sont vraiment dans leur déshabillé nos agresseurs, qui sont aujourd’hui nos plus intelligents témoins les uns contres autres.

Nous avons essayé de faire comprendre à Rome les choses telles qu’elles sont. Nous n’avons dit que des choses vraies, au contraire de nos ennemis qui ont défiguré les faits pour voiler leurs fautes et faire croire à notre culpabilité exclusive. Nous voyons que les choses raisonnables que nous avons dites, que les considérations importantes que nous avons soumises, que les respectueuses représentations que nous avons faites, sont allées se briser contre la prévention et le mauvais vouloir ! Prévenus dès l’abord par des informations partiales et intéressées, et des accusations dans lesquelles l’étroitesse des vues et l’incompétence per-

    Québec se promener avec son désaveu de leur programme catholique !

    Chose remarquable ! Le Nouveau-Monde, qui est sous le contrôle immédiat de l’Évêque de Montréal qui en est le fondateur et en est resté le patron ; le Journal de Trois-Rivières, qui est sous le contrôle immédiat de l’Évèque de Trois-Rivières ; l’Ordre, qui reçoit chaque matin son mot de passe d’un chanoine de l’Évêché ; et l’Union des cantons de l’Est, dont la plupart des articles de fonds sont écrits par des prêtres, insultent tous quatre, à mot très peu couverts, l’Archevêque de Québec et lui signifient vertement, soit directement soit en se reproduisant les uns les autres, qu’ils sont seuls juges de ce qui peut convenir aux Électeurs pour les guider dans le choix des Législateurs ; et qu’ils attendront que leur propre Évêque les blâme avant d’admettre qu’ils se soient trompés.

    Voilà comment les journaux à bons principes, que Mgr. de Montréal comble de si grands éloges dans sa circulaire au clergé du 5 de ce mois, témoignent de leur respect envers le Métropolitain du pays

    On l’informe sans façon qu’il n’est qu’un Évêque étranger, et qu’on l’écoutera quand on le jugera à propos.

    Voilà les hypocrites qui nous ont reproché de l’insoumission parceque nous ne retranchons pas d’une bibliothèque publique certains ouvrages de science, de droit, d’histoire profane ou sacrée, et d’économie politique, sans lesquels pas une bibliothèque ne saurait mériter ce nom.

    Et chose plus remarquable encore : voilà la presse ultramontaine arrivée à soutenir comme nous, après nous avoir traité d’impies précisément sur cette question, l’indépendance du catholique dans le domaine temporel.

    Nous, libéraux, nous disons : « Dans l’ordre temporel, le catholique est entièrement libre de ses déterminations et de ses actes. »

    Et la presse ultramontaine d’ici dit de son côté aux Évêques : « Nous sommes juges de ce qui peut convenir aux électeurs… »

    À propos de quoi cette assertion est-elle faite ? À propos d’une lettre de l’Archevêque, soutenue des lettres de deux autres Évêques, qui informe cette sainte presse que son prétendu programme catholique a été fait en dehors de toute participation de l’épiscopat, et qu’on le désavoue. À ce désaveu épiscopal, que répond-on en fait ? « Nous ne sommes pas dans vos diocèses, Messeigneurs, veuillez donc vous mêler de ce qui vous regarde jusqu’à ce que notre propre évêque ait parlé. »

    Et notez bien que pendant que nous, libéraux, nous déclarons indépendants dans le domaine temporel, les saintes feuilles que j’ai nommées insultent un Archevêque et deux évêques qui veulent les empêcher de mêler ineptement la religion à la politique ! C’est-à-dire que ces saintes feuilles réclament leur indépendance même sur le terrain jugé religieux par l’Archevêque et deux de ses suffragants. Elles nous donnent donc le magnifique exemple, chez des gens à bons principes, de résister à l’autorité religieuse sur le terrain qu’elle-même prononce appartenir à l’ordre religieux.

    Tout ce que les saintes feuilles nous ont dit sur la soumission due aux évêques ; toutes leurs catholiques protestations et leurs pieuses remontrances à notre adresse, n’ont donc jamais été qu’hypocrisie, farce et déception ! Dès qu’une décision épiscopale ne leur convient pas, elles savent donc s’en débarrasser malgré leurs sages conseils aux impies ! Et cela, remarquez-le bien, quand ces décisions touchent le terrain religieux puisqu’il s’agit d’un programme catholique !

    Il est vrai qu’elles protestent toujours miel-