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la plus belle frousse du monde lorsque s’est produite l’attaque contre le fort Vermillon, — je leur ai joué une petite comédie, — et qu’ainsi je n’étais pas de connivence avec les Gros-Ventres.

— Oui, le danger ne semble pas grave.

Mais l’aventure, de l’avis du Premier, présente des aspects inquiétants : cette victoire apparente des Indiens des plaines sur les Blancs peut encourager les premiers dans une voie dangereuse. Déjà ils ont ourdi une conspiration générale pour chasser les commerçants. En plus, les chefs des deux Compagnies rivales prendront-ils le change, eux ? Et ils peuvent préparer des représailles aussi violentes que l’attaque…

Mais enfin, les fourrures en entrepôt, il n’y a plus qu’à laisser dormir l’affaire.

— Philippe Lelâcheur m’a aidé. J’avais absolument besoin de quelqu’un ; il est au courant de tout. Peut-être pourrions-nous lui donner un petit poste quelque part…

Simon McTavish a un haut-le-corps.

— Mais je ne pouvais mener à bien cette entreprise, tout seul…

— Oui, très bien. Je vois : une petite récompense s’impose.

— Il n’est pas exigeant, vous savez.

— Bien.

Le Premier se recueille un peu.

— Il vaudrait mieux, pour le moment, que vous changiez de district… J’ai justement un poste à vous offrir… Dangereux… Nous voulons construire un fort sur les rives du lac de la rivière Rouge. Depuis plusieurs années ce territoire est en friche… La frontière entre les Sioux et les Saulteurs passe quelque part par là. Le castor y abonde. Les Indiens qui fréquentent ces parages n’y restent jamais longtemps. Vous seriez sous les ordres de William Henry…

— C’est une mission difficile.

— Oui… Mais si vous réussissez dans celle-là…

— Je cours le risque d’y laisser ma peau.

— Je ne crois pas. D’ailleurs, savez-vous que votre existence

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