Page:Desrosiers - Iroquoisie, tome 1 (1534-1646), 1947.djvu/86

Cette page a été validée par deux contributeurs.
88
IROQUOISIE

sieurs bourgades, et toutes viennent de l’intérieur sur ce fleuve pour la traite… »[1]. Il est difficile de ne pas reconnaître dans ces bourgades, les villages des Iroquois. L’état de guerre n’existe pas encore alors non-plus entre Agniers et Mohicans, de sorte que les premiers peuvent probablement circuler sur les terres des seconds. Mais Fort Orange n’est pas fondé ; la traite n’est pas organisée sur une base régulière ; l’Iroquoisie n’accède pas directement à l’Hudson ; le commerce n’a pas épuisé les ressources pelletières de l’Iroquoisie, loin de là ; les Agniers, peut-être aussi les Onneyouts ont pris contact avec les Hollandais, mais les autres tribus les connaissent peu. Est-il plausible que dans ces conditions la Confédération iroquoise ait entamé des négociations sérieuses avec les Hurons, ou, en général, avec la Coalition laurentienne pour devenir leurs intermédiaires et disposer de leurs fourrures ? L’affaire paraît prématurée. Ne s’agirait-il pas plutôt d’appréhensions ? Toutefois l’affaire n’est pas impossible.

Champlain a très bien compris les avantages et les bienfaits d’une paix entre Coalition laurentienne et Confédération iroquoise. Il s’y est consacré. Mais Nouvelle-France et Nouvelle-Hollande sont en réalité entre les mains de deux vastes sociétés ; elles distinguent immédiatement toutes deux, ou peu de temps l’une après l’autre, les conséquences dangereuses que peut avoir pour elles un traité de paix entre ces tribus ennemies. Elles jouissent d’un monopole ; pour cette raison, elles donnent peu de marchandises aux Indiens pour leurs pelleteries, elles les obtiennent à bon compte, étant maîtresses de la situation. Lescarbot, Sagard, le père Le Caron signalent pour la Nouvelle-France les bas prix versés pour les fourrures. Quand l’état de guerre règne, les Indiens canadiens ne peuvent se rendre à Fort Orange pour solliciter et obtenir un paiement plus élevé ; ni d’ailleurs, les Indiens de la Nouvelle-Hollande ne peuvent se rendre à Québec, avec le même dessein. Mais que l’état de paix s’établisse, et les Indiens se rendent chez le voisin ; et alors c’est la concurrence, et c’est la hausse

  1. Narratives of New-Netherland, p. 68.