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IROQUOISIE

compagnons de route et repris le chemin de la Huronie. Subitement attaquée par les Tsonnontouans, la petite troupe est dispersée. Brûlé se retrouve seul ; il erre dans la forêt ; il suit un sentier et tente de parler à trois sauvages qu’il rencontre. Ce sont des Iroquois qui le conduisent à leur village. Et là, le premier des Français, il subit un commencement de supplice ; les Tsonnontouans lui arrachent des ongles avec leurs dents, le brûlent avec des tisons, lui arrachent la barbe. Un orage éclate à propos, interrompt la torture, produit une forte impression sur ces gens féroces. Après avoir promis de réconcilier les Iroquois avec leurs ennemis, Brûlé obtient permission de continuer sa route. Il revient en Huronie et continue à visiter des peuples et des tribus.

Brûlé avait reçu des instructions ; il ne devait pas oublier le commerce des pelleteries. Aussi, partout, il a fait alliance avec des Indiens, « à la charge qu’ils viendraient faire traite avec nous, et que je les assisterais en leurs guerres »[1]. Il faut noter la phrase précédente. Elle exprime l’entente entre la coalition laurentienne et les Français. En termes clairs et nets, Champlain dit enfin que la France s’engage à fournir l’assistance militaire à ces tribus contre les Iroquois, à condition que celles-ci apportent leurs fourrures à la traite.

Champlain encourage Brûlé à retourner dans le nord-ouest. Il l’incite à poursuivre son ouvrage, à revenir l’an prochain, avec de nouveaux Indiens ; lui, il viendra au rendez-vous avec bon nombre d’hommes « pour assister les sauvages, ses amis, en leurs guerres, comme par le passé. » Brûlé emploie donc la tactique même dont Champlain s’est servi en 1613, sur l’Outaouais, et qui lui a si bien réussi.

Le rapport de Brûlé est infiniment précieux à son chef. Il agrandit pour lui les frontières des terres et des peuples connus. Désormais les Français pourront compter sur les Andastes, ces allies lointains de la coalition laurentienne, ces hardis guerriers qui, par leurs courses audacieuses au sud de l’Iroquoisie, sauveront sans doute la Nouvelle-France, ou lui

  1. Œuvres de Champlain, v. 3, p. 226.