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IROQUOISIE

livrer ce dernier combat auront bientôt lieu les foires annuelles. Champlain peut organiser un commerce de fourrures qui sera assez abondant pour assurer la fondation de la colonie. Celui-ci pourra bientôt pousser ses racines jusqu’aux Grands Lacs et même au delà.

La victoire gagnée, les autres barques françaises s’approchent ; leurs occupants dépouillent de leurs robes de castor les cadavres encore chauds pendant que les Algonquis les scalpent. C’est ensuite le retour à l’île, les Alliés comptent trois morts, une cinquantaine de blessés, mais les réjouissances suivent leur cours. La traite a lieu. Par sa politique d’assistance militaire, la compagnie que Champlain représente a déjà attiré nombre de tribus, mais elle n’obtient pas plus de pelleteries que ses concurrentes. « C’était, dit-il, leur avoir fait un grand plaisir de leur être allé chercher des nations étrangères, pour après emporter le profit sans aucun risque ni hasard »[1]. Ce dépit trahit Champlain. L’alliance avec les Algonquins devait permettre les découvertes, mais elle devait aussi décupler le volume du commerce.

Puis commence l’ordinaire, long et supplice des prisonniers. Les alliés en tourmentent deux ou trois. Leur science raffinée dans ce domaine étonne les Français. Ils soignent les autres : ceux-ci recevront la mort aux mains de leurs femmes et filles « qui en cela ne se montrent pas moins inhumaines que les hommes, encore elles les surpassent de beaucoup en cruauté : car par leur subtilité elles inventent des supplices plus cruels, et y prennent plaisir, les faisant ainsi finir leur vie en douleurs extrêmes »[2].

Pont-Gravé et Champlain se rappellent alors leur mission de découvreurs. Incapables de se mettre eux-mêmes à la tâche, ils envoient un jeune homme, Brûlé tout probablement, hiverner avec le capitaine Yroquet dans la région qui s’étend entre Kingston et Ottawa.

  1. Œuvres de Champlain, v. 2, p. 135.
  2. Idem, v. 2, p. 137.