Page:Desrosiers - Iroquoisie, tome 1 (1534-1646), 1947.djvu/36

Cette page a été validée par deux contributeurs.
38
IROQUOISIE

à des conditions bien déterminées. Champlain conduira le parti de guerre ; pour attirer les fourrures à la compagnie qu’il représente, pour lui donner un avantage certain sur ses concurrents, il fera grand état, auprès des Indiens, des services militaires qu’il leur rend. C’est un truc commercial. Mais le fond du problème n’est pas là. Il n’est même pas dans les raisons pourtant fortes mentionnées par Lescarbot et Champlain lui-même : l’aide militaire promise en retour de la permission de fonder des colonies et de faire des découvertes dans le pays.

Le conflit franco-iroquois est inévitable dès le début, car il est dans la nature des choses. Rien ne saurait l’empêcher. Une colonie se fonde à Québec elle a pour assise le troc des pelleteries ; elle ne peut subsister, se développer, que s’il arrive beaucoup de fourrures ; que si les tribus du Saint-Laurent, de l’Outaouais, des Grands Lacs peuvent descendre aux postes de traite. Si une peuplade indienne bloque la navigation, il faut à tout prix la refouler chez elle.

Et la navigation est facile à bloquer. Les postes de traite, Tadoussac et Québec, sont fort éloignés des lieux d’où partent les pelleteries. Toute tribu hostile peut facilement se mettre à l’affût dans la forêt, sur le bord du fleuve. Par contre, Albany est aux portes de l’Iroquoisie d’où elle recevra ses fourrures ; leur flot circule au cœur du pays des Iroquois et ne peut être facilement arrêté par des Indiens venant de loin. Aussi les Hollandais pourront facilement rester neutres dans le conflit entre Algonquins et Iroquois, tandis que les Français sont obligés d’intervenir.

Puis les Algonquins sont les plus faibles, les moins nombreux. Les Hollandais peuvent assister au conflit de loin, sans y prendre part, parce que leurs pourvoyeurs de fourrures, les Iroquois, n’ont pas besoin de secours. Il n’en est pas de même des Français. Si les Algonquins sont détruits, ou contraints de se retirer, qui viendra à leurs postes de traite ? Un commerce important, et qui s’élargit de jour en jour, peut périr ; et périr en même temps les œuvres qu’il alimente. Car dans cette vaste Amérique, une solidarité étroite