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IROQUOISIE

harangue la foule et il livre ses prisonniers au Gouverneur : « Les voilà tous entiers sans être offensés, je vous le jure, disposez-en selon vos pensées »[1]. Il agit ainsi parce qu’il connaît les intentions de Montmagny : « J’entre dans vos pensées, elle sont bonnes…, mettez la paix partout, donnez le repos à tout le pays ». Un compagnon de Piescaret tranche les liens, les lance dans le feu avec le couteau : « Je n’ai plus… de passion que pour la paix »[2]. Le Gouverneur distribue alors des présents en récompense : armes à feu, poudre, plomb. Les Agniers n’ont pas compris les paroles qui se sont prononcées devant eux, mais ils comprennent bien la cérémonie du rachat. L’un d’eux se lève et dit : « Voilà qui va bien, mon corps est délivré de la mort, je suis retiré du feu : Ononthio, tu m’as donné la vie, je t’en remercie…, la terre va être toute belle, la rivière sera toute calme et toute unie, et la paix nous fera tous amis ». Puis il danse, il mime la colère, il jette sa hache au feu.

La cérémonie terminée, chacun se retire. Des soldats veillent sur les prisonniers. Les Algonquins disent que ce n’est pas nécessaire et que les Iroquois ne craignent pas ceux qui leur ont donné la vie.

Parlant de Piescaret et du Gouverneur, Marie de l’incarnation dit ce qui suit : « … Il n’avait été à la guerre que pour lui amener des prisonniers, selon la promesse qu’il lui en avait faite depuis longtemps… »[3]. Montmagny voulait négocier un traité de paix. L’un des prisonniers de Piescaret, disait maintenant que « si l’on voulait renvoyer en leur pays le prisonnier iroquois que l’on gardait aux Trois-Rivières dès l’an passé, et qui passait parmi ceux de sa nation pour un homme de marque et de considération, il ne doutait point qu’il ne rapportât des nouvelles capables de faire quitter les armes »[4]. Cet Agnier vivait en liberté parmi les Français depuis l’automne passé ; c’était un chef, peut-être un sachem dans sa tribu ; il félicitait maintenant ses compagnons d’être tombés entre les mains de vainqueurs aussi indulgents que les Français.

  1. Idem, 1645-22.
  2. Idem, 1645-22.
  3. Marie de l’incarnation, Écrits spirituels et historiques v. 4, p. 24.
  4. Idem, v. 4, p. 25.