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Le père Lalemant raconte aussi quelques faits militaires. Les chrétiens forment un parti qui passe deux mois en campagne. Deux capitaines païens qui l’accompagnent se convertissent en route. Les Hurons rencontrent enfin une bande iroquoise, mais beaucoup plus nombreuse ; ils combattent sept contre un. C’est une autre défaite. Pas un ne prend la fuite. Les deux convertis perdent la vie et « quantité de chrétiens… y demeurèrent avec eux… »[1].

Un autre parti de guerriers chrétiens part aussi pour l’Iroquoisie. Il se heurte à un parti ennemi qui fait volte-face et fuit. Il le poursuit pendant six heures. Se laissant emporter par son ardeur un jeune guerrier est soudain entouré par trente Iroquois qui le percent de coups d’épée et qui le scalpent. L’ennemi retraite rapidement et bientôt le contact se perd.

Les Relations huronnes étaient autrefois gonflées de faits relatifs aux épidémies ; elles le sont aujourd’hui de faits militaires. On voit surgir continuellement des Hurons évadés avant le supplice, d’autres qui portent les marques des tortures ; on rappelle le souvenir de ceux qui sont morts. Chacun obtient une ligne, un paragraphe, une page, fragments d’une épopée dont la trame ne se connaîtra jamais.

Le père Lalemant adjure la France de sauver la Huronie. Elle doit faire « des efforts extraordinaires pour renverser cet ennemi » qui la ruine. Elle ne doit pas oublier les missionnaires qui « portent chaque jour leur âme entre leurs mains, étant continuellement exposés à mille dangers de la mort, et que peut-être la plupart sont pour mourir au milieu des feux et des flammes d’un ennemi cruel, qui va de jour en jour ravageant ces pays… »[2].


(1644)

Si les missionnaires signalent en 1644 que les Hurons sont aux abois, ils notent aussi l’épuisement maintenant complet des tribus algonquines. L’état

  1. Idem, 1645-49.
  2. Idem, 1645-51.