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IROQUOISIE

En un mot, les événements importants de cette période de trente ans, n’ont pratiquement laissé aucun souvenir certain dans la mémoire des hommes. Tout n’est que conjectures. Il faut s’en tenir presque exclusivement aux récits de Cartier et de Champlain : le premier trouve une grosse population iroquoise dans la Nouvelle-France ; le second y trouve une population algonquine, mais en état de guerre avec un peuple iroquois qui habite au sud du lac Ontario et du fleuve Saint-Laurent. En 1603, ces Iroquois d’Iroquoisie ne sont pas sur la défensive. Ils se sont ressaisis. C’est à l’embouchure du Richelieu que leur incursion de 1603 a été arrêtée. Les Algonquins n’avaient mobilisé leurs mille guerriers que pour leur défendre l’accès du fleuve.

Champlain n’a que bien peu de temps à sa disposition pour étudier tous ces faits. Il remonte rapidement le fleuve désert. Bientôt, il atteint la zone dangereuse : les Trois-Rivières. Il examine rapidement le lieu, il décrit les îles. La plus grande pourrait être facilement fortifiée, dit-il, « car sa situation est forte de soi ». Pourquoi ce projet imprévu de fortifications ? « Aussi, dit-il, que l’habitation des Trois-Rivières serait un bien pour la liberté de quelques nations qui n’osent venir par là, à cause desdits Iroquois, leurs ennemis, qui tiennent toute ladite rivière du Canada bordée ; mais étant habité, on pourrait rendre lesdits Iroquois et autres sauvages amis, ou à tout le moins sous la faveur de ladite habitation, lesdits sauvages viendraient librement sans crainte et danger ; d’autant que ledit lieu des trois-rivières est un passage »[1]. Pourquoi les Indiens d’amont veulent-ils descendre le fleuve ? Pourquoi est-il important qu’ils puissent le faire ? Pourquoi les Français veulent-ils tellement leur faciliter le passage qu’ils parlent d’encourir les dépenses de construction d’un poste, les frais d’entretien d’une garnison ? Évidemment, il s’agit du commerce des fourrures. La navigation doit être libre, pour que le transport des pelleteries et des marchandises de traite le soit. Car déjà, à cette date, les Algonquins de l’Outaouais

  1. Œuvres de Champlain, v. 1. p. 137.