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IROQUOISIE

Une semaine après l’arrivée, soit le vingt août, les ouvriers ont presque terminé l’ouvrage. Ils plantent maintenant les palis, des troncs d’arbres, qui entoureront les maisons d’une haute et solide clôture. Soudain le soir surviennent en silence, trois cents guerriers iroquois ; ils se divisent en trois bandes et ils se portent à l’assaut avec résolution ; ils coordonnent bien, semble-t-il aussi, leurs mouvements. Mais le récit du combat est confus, on ne devine pas les grandes lignes de l’attaque. Quelques actions se dessinent pourtant dans cette mêlée. Le caporal Du Rocher, par exemple, voyant l’ennemi sur le point de pénétrer dans l’enceinte, charge avec ses soldats et le repousse avec furie. Montmagny qui était dans l’une des barques se fait conduire à terre ; il entre « dans le réduit, qui n’était pas encore en état de se bien défendre ». Il prend en main la direction des opérations. « Un grand Iroquois, portant un panache ou une espèce de couronne de poil de cerf, teint en écarlate, enrichi d’un collier de porcelaine, s’avançant trop, est couché par terre tout raide mort d’une mousquetade »[1]. À un moment donné, l’ennemi tire même du dehors par les meurtrières. Mais enfin, « nos Français étant animés, se ruent avec un tel carnage, qu’ils font lâcher pied à ces barbares ». Il avait même fallu défendre les embarcations contre un assaut particulier qui n’avait pas manqué de vivacité.

Les Iroquois retraitent avec assez d’ordre, mais d’une façon précipitée. Ils abandonnent boucliers, arcs, flèches, masses d’armes, « outre ce qu’ils avaient eu des traîtres hollandais »[2]. En suivant les traces de sang, les soldats constatent que l’ennemi transporte des morts et des blessés et qu’il va se terrer pour un temps dans un fortin érigé à une lieue plus haut sur le Richelieu, selon son habitude.

D’après le témoignage de Marie de l’Incarnation, Montmagny est sur les lieux avec « trois barques bien équipées, avec son brigantin et environ cent hommes d’armes ». Le caporal Deslauriers est tué ; quatre Français reçoivent des blessures ; parmi ces derniers, il faut mentionner le secrétaire du Gouver-

  1. Idem, 1642-51
  2. Marie de l’Incarnation, Écrits spirituels et historiques, v. 1, p. 151