Les Agniers laissent leur message ordinaire sur une planchette à l’embouchure du Richelieu. C’est quatre Algonquins échappés à l’ennemi qui interprètent ces hiéroglyphes aux Français. Les douze têtes peintes en rouge indiquent douze prisonniers qui subiront le supplice du feu ; les six têtes peintes en noir indiquent six prisonniers qui ne sont pas condamnés ; une tête dessinée au-dessus des précédentes révèle un grand capitaine, Ahasistari. L’absence de marques pour Thérèse et son petit cousin annonce « qu’ils ne sont plus liés, et qu’ils la garderont libre parmi eux »[1]. Il est possible que neuf prisonniers aient été immédiatement brûlés.
La caravane s’avance rapidement vers les bourgades des Agniers. Aux Trois-Rivières règne l’anxiété. De quelle façon l’ennemi traitera-t-il les Français ? Les Algonquins répondent à cette question : « Nous allons voir, maintenant, disent-ils, si les Iroquois ont peur de vous ou non. Aussitôt que votre frère Ondessonk arrivera dans leur pays, les chefs s’assembleront en conseil. S’ils ont de la crainte pour les Français, ils garderont Ondessonk prisonnier et le ramèneront ici au printemps ; mais au contraire, s’ils vous méprisent, ils mettront les Français en pièces et les mangeront, puis ils diront : « Cette chair est bonne, nous en voulons d’autre », et ils exciteront leurs guerriers à aller à la chasse aux Français. Aucun établissement français ne sera à l’abri de leur guet-apens ».
Dans le temps même que le père Isaac Jogues est capturé au lac Saint-Pierre, une autre bataille se livre dans le sud-ouest de la Nouvelle-France. Une escadrille huronne, composée de onze canots, descend avec sa cargaison de fourrures. Elles fait halte dans une île située à cinquante lieues au-dessus de Montréal, disent les Relations, et « proche de Mont-Réal »[2], dit Marie de l’Incarnation. Une partie des hommes