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IROQUOISIE

bourgades. Ceux qui demeurent sur place passent une nuit terrible, dans le supplice du feu. Au matin, ils montent sur les échafauds. Armée de tisons et de flambeaux, la foule inflige les tortures dernières, appliquant soigneusement la flamme aux pieds, aux cuisses, aux côtés, partout. Les captives reçoivent l’ordre de brûler elles-mêmes leurs parents. Une jeune fille se cuirasse d’indifférence et exécute l’ordre : elle subira plus tard des tourments plus affreux que les autres. Impassible, un Algonquin subira toute la gamme des souffrances, sans crier, pleurer ou grimacer, sans donner aucun signe de douleur. Tout comme les Hurons, les Iroquois interprètent cette endurance comme un phénomène de mauvais augure ; ils s’acharnent sur cet homme avec l’espoir d’entendre une plainte, ils le rôtissent sur tous les côtés, ils le traînent dans tous les feux, ils le scalpent et lui versent du sable brûlant sur la tête ; mais sans succès, et, bientôt de rage, ils lui ouvrent la poitrine et lui arrachent le cœur.

Les Iroquois ne tuent cependant que les hommes et les femmes les plus âgés. Ils épargnent une trentaine des plus jeunes femmes pour qu’elles puissent « vivre dans leur pays et se marier ». Elles remplaceront les Iroquoises que les Algonquins ont massacrées l’an précédent. Immédiatement, elles commencent leur existence d’esclaves, « entendant tous les jours les rodomontades que faisaient ces barbares contre les Français et contre les Algonquins, qu’ils veulent entièrement exterminer, à ce qu’ils disent, se sentant appuyés et armés des Hollandais »[1]. Il est assez difficile d’évaluer les pertes que subit la Petite Nation dans cette affaire. Les Relations disent que les Iroquois conservent la vie à trente Algonquines et Marie de l’incarnation, à vingt. Aucun chiffre n’indique le nombre des autres victimes. Peut-être se monte-t-il à soixante, à quatre-vingts.

  1. Idem, 1642-48