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IROQUOISIE

chanson lugubre, comme ils ont accoutumé de faire en guerre lorsqu’ils sont dans le désespoir de la vie… »[1]. Et la tempête s’apaiserait à la prière d’un chrétien qui a vécu deux ans à Québec, au séminaire des Hurons. Le même individu avait été engagé autrefois dans un combat furieux ; ses compagnons l’avaient abandonné et il devait faire face, seul, à de nombreux adversaires. Mais, d’après le récit du missionnaire, il prie et les flèches s’écartent de sa personne comme « fait l’eau lorsqu’elle rencontre la pointe du vaisseau qui va contre marée ». Il se retrouve plus tard sans blessure parmi ses compagnons. Les Iroquois ont aussi quelques vaillants chefs de guerre. L’un d’eux « toutes les années est la terreur de nos Hurons »[2].

Possédé par un démon furieux, un Huron se jette dans les feux allumés sans éprouver aucune douleur. Pendant plusieurs jours, il pousse des hurlements ; il prédit que les Iroquois mettront de grosses troupes en campagne durant l’année 1642.

Et ces expéditions sont comme des coups d’épingle qui exaspèrent les Iroquois. Elles ne sont pas, assez puissantes pour leur infliger aucun dommage sérieux. Mais elles les irritent alors que la coalition laurentienne est devenue très faible et ne pourrait supporter aucune attaque massive.

Une nouvelle cause de faiblesse s’ajoute aux précédentes. Les maladies contagieuses ont humilié la superbe huronne. Elles ont plongé le peuple dans le désespoir. Les souffrances lui ont ouvert l’esprit à la doctrine chrétienne. Les conversions se multiplient maintenant. Une fraction de plus en plus importante de la population devient catholique pendant que l’autre demeure païenne. Entre les deux c’est bientôt une scission douloureuse. Elle sévit dans chaque tribu, dans chaque bourg, dans chaque cabane.

C’est une histoire pénible. Les païens sont sincères. Ils croient que la disparition des coutumes anciennes est une cause de ruine et d’abaissement. Ils voient leurs compatriotes abandonner les festins,

  1. RDJ, 1642-87.
  2. Idem, 1642-83.