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IROQUOISIE

Le 11 juin, il pleut, il vente. Le Gouverneur ne sort pas du fort. Peut-être préfère-t-il attendre que la barque soit arrivée au port et qu’il ait toutes ses forces autour de lui pour donner la réponse à laquelle il pense. Les Iroquois n’auraient-ils pas formé le complot de s’emparer de lui, du père Ragueneau et de Nicolet ? C’est un projet qu’on leur prête. En attendant, ils demeurent eux aussi dans leur fortin, redoutant les Algonquins qu’ils n’épargnent pas.

Ce n’est que le surlendemain que l’escadrille, maintenant complète, va mouiller de nouveau le long de la rive droite. Mais cette fois, les Iroquois ne bougent point. Ils n’envoient aucun canot pour ramener les négociateurs. Leurs dispositions, à eux aussi, ne sont plus les mêmes. À la fin, ils poussent une pirogue vide vers les navires. Ils crient et l’on comprend confusément qu’ils invitent le Gouverneur-général, le père Paul Ragueneau et Nicolet à s’embarquer pour venir parmi eux. Ce procédé peu courtois augmente la défiance des Français. Ceux-ci invitent alors les sachems iroquois à venir sur les bateaux pour écouter la réponse de Montmagny ; les ambassadeurs français n’ont pas craint, eux, hier, de se rendre dans le fortin iroquois.

Aucune réponse ne vient du rivage. Les Français demandent alors d’envoyer quelques uns des Hurons. Les Iroquois acceptent. Deux Hurons arrivent bientôt dans un canot. Ils montent à bord. Ils cherchent de tous côtés ; ils examinent tout. Ensuite, ils donnent l’explication de leurs recherches : craignant d’être payés de leur propre monnaie, les Iroquois s’attendaient à trouver sur les navires des Algonquins qui les auraient massacrés.

Maintenant rassurés, trois capitaines iroquois s’embarquent dans une autre pirogue. Ils s’approchent à portée de pistolet ; mais pas plus. Ils invitent le Gouverneur à parler. Et le conseil prend place de la façon étrange suivante : Montmagny est dans la barque, à une certaine distance du rivage, soixante-dix hommes armés jusqu’aux dents autour de lui ; plus loin, assez loin sans doute pour qu’il faille crier