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IROQUOISIE

Quelques historiens ont noté ce fait. Arthur H. Buffinton a même écrit les phrases suivantes : « La bonne entente entre les Hollandais et les Iroquois était en bonne partie confinée à la tribu des Agniers… Les relations avec les autres tribus de la Confédération étaient intermittentes… »[1]. Sans doute avait-il alors à l’esprit des notations comme la suivante, écrite cinq ou six ans après 1637 : « Parmi tous les Indiens et tous les sauvages des alentours, la principale nation avec laquelle nous avons le plus de relations est celle des Agniers… »[2]. Ce point est important. Il doit être précisé dès le début. Tous les documents hollandais le prouvent d’une façon nette. Plus tard, les Onneyouts seront entrainés d’une façon particulière dans l’orbite des Hollandais, des Anglais aussi. Or, les Agniers sont particulièrement mal placés pour obtenir des fourrures des autres peuples. Au nord, vivent les ennemis héréditaires de la Confédération iroquoise : à l’est, les Indiens ont des factoreries à leur portée ; au sud, voilà d’autres ennemis, les Andastes ; à l’ouest, s’étend le domaine des quatre tribus iroquoises supérieures qui peuvent atteindre facilement les Ériés, les Neutres, les peuplades qui se distribuent vers l’occident, pour acheter des pelleteries ou les échanger contre des marchandises européennes.

Ces faits imposent la conviction que ce sont les Agniers qui ont conduit l’expédition au Saint-Laurent en 1637. Le nombre des guerriers correspond à celui qu’ils mobiliseront assez souvent ; la route qu’ils ont suivie, celle du Richelieu, est bien la leur ; nombre d’autres incursions porteront les mêmes caractères généraux. Mais pourquoi sont-ils venus ? Les Algonquins, il est vrai, les ont provoqués par une guérilla opiniâtre poursuivie autour de leurs bourgades. Toutefois, le fait de placer si habilement des troupes dans les chenaux des îles du lac Saint-Pierre, pour capturer les canots hurons au passage, indique, en plus d’une volonté de vengeance, le dessin déterminé de s’emparer des pelleteries du convoi.

L’audace même de l’entreprise est une preuve du besoin croissant de fourrures qu’éprouvent les Agniers.

  1. Arthur Buffinton, The Mississipi Valley Historical Review, v. 8, p. 331.
  2. Narratives of New-Netherland, p. 172.