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IROQUOISIE

échouée sur la rive. Il s’en empare bientôt et il arrive au fort. Un autre Huron racontera qu’il avait passé la nuit près du lieu où les Iroquois soumettaient aux tortures le grand capitaine Tarantouan et ses compagnons. Il l’entendait « chanter aussi fortement et aussi gaiement, que s’il eut été parmi ses amis ».

Toute la région des îles fourmille d’ennemis. Le soir même du jour où tant de fugitifs arrivent à bon port, un autre canot se présente encore. Celui-ci ne voyageait de conserve qu’avec un autre canot. À la sortie du lac, deux embarcations se dessinent au loin ; l’un d’eux s’avance pour les reconnaître ; il s’aperçoit trop tard du danger et il tombe lui aussi aux mains des ennemis. La nuit s’approche, et grâce à l’obscurité, le second canot parvient à s’échapper ; mais il est poursuivi de nouveau, et, cette fois, à peu de distance des Trois-Rivières. « C’était un grand crève-cœur à Monsieur le Gouverneur et à tous nos Français, de ne pouvoir éloigner de nous ces coureurs, à raison du petit nombre d’hommes que nous étions n’étant pas à propos de laisser notre réduit ou palissade sans défense »[1]. Dans le chenal du nord, où les Iroquois s’étaient mis à l’affût, « leur embuscade était si bien dressée que les neufs canots furent entourés et pris, avant d’avoir pu faire un mouvement de résistance ».

Le neuf août, à la nuit, un feu s’allume sur la rive droite en face des Trois-Rivières. Les Indiens vont en reconnaissance. Ils trouvent deux compagnons du séminariste huron qui se sont échappés comme lui. Nus, sans fusil, couteau ni hache, ils ont subsisté quand même.

Les Iroquois sont arrivés sur le fleuve le six août. Ce n’est que cinq jours plus tard, le onze, que des secours de Québec arrivent aux Trois-Rivières. Sur réception des ordres de Montmagny, Monsieur de l’Isle a armé deux chaloupes en toute diligence ; il a mobilisé les matelots des navires qui sont dans le port, les colons et fils de colons. Il a d’abord expédié les deux chaloupes. Quand elles arrivent aux Trois-Rivières, Montmagny n’attend pas les autres navires retenus par des vents contraires. Il monte dans

  1. RDJ, 1637-90.