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IROQUOISIE

ce sont les missionnaires qui auraient comploté la destruction du peuple. Les Cheveux-Relevés ou Outaouais envoient une députation à ces derniers pour leur demander de les épargner. Les chamans invitent mille moyens d’éviter la contagion. Des scènes diaboliques se déroulent souvent. Aussi habiles que des fakirs hindous, les membres d’une société huronne secrète jouent avec le feu sans se brûler. Les premières attaques du christianisme se heurtent aux superstitions, aux croyances païennes, et c’est parmi les maladies et la mort, un premier choc passionné et violent.

Quand le convoi de fourrures part en juin, l’épidémie dure depuis huit mois, et toujours avec la même intensité. Les Iroquois ont discontinué leurs attaques, laissant la maladie accomplir son œuvre plus terrible que la guerre. Les Hurons s’éloignent donc dans la paix. Leurs canots ne forment pas une flottille compacte ; ils voyagent souvent par groupes qui se suivent à plusieurs journées d’intervalle. L’épidémie s’embarque avec eux et redescend le fleuve. Le père Pijart arrive « tout défait, ayant été fort fatigué et bien malade en chemin. Il était pieds nus, portant sur sa tête et sur son corps un chapeau et une soutane qui ne valaient pas deux doubles… »[1]. Il rapporte « que la contagion étant sur tous les chemins, il avait pensé mourir… » Et des Hurons viennent mourir aux Trois-Rivières, après avoir infecté de nouveau les tribus de l’Outaouais, comme le capitaine Aenons qui a conduit le missionnaire.

Un groupe assez considérable arrive vers la fin du mois de juillet. Montmagny et quelques français se rendent aux Trois-Rivières pour les rencontrer. Un conseil a lieu le 2 août. On discute la question d’un séminaire huron. Le père Paul Ragueneau part avec quelques Hurons. Puis le six août, deux canots le suivent.

Et voilà qu’à dix heures, le même soir, la population des Trois-Rivières entend au loin le cri d’alarme trop connu : « Ouai, Ouai, Ouai ». Les Algonquins connaissent bien cet appel. Un canot surgit peu

  1. RDJ, 1637-88.