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IROQUOISIE

Malgré ces terreurs, les Algonquins se maîtrisent et se lancent à l’attaque. Le 24 avril, un capitaine de Tadoussac s’arrête à Québec avec un groupe de guerriers. Il voit le Gouverneur, puis les Jésuites. Il est rempli de jactance, il a bonne opinion de lui-même et de son peuple. Saisissant un crayon, il dessine le chemin qui conduit à l’Iroquoisie, l’Iroquoisie elle même, l’emplacement des bourgades.

Après un court séjour, la bande part, pleine de confiance. Elle s’augmente en route d’un certain nombre d’Algonquins que la haine des Iroquois travaille. Elle voyage rapidement. Bientôt, elle atteint un village, probablement dans le pays des Agniers. Soudain, elle découvre un Iroquois et se lance à la poursuite. Elle s’enfonce de plus en plus avant dans le territoire ennemi. C’est le printemps ; dans un espace découvert, un défriché, le feu consomme des détritus ; une épaisse fumée emplit la clairière ; elle empêche de rien distinguer. Soudain, « ceux qui brûlaient ou fumaient leurs champs selon leur coutume »[1] voient surgir leur compatriote poursuivi ; ils accourent, saisissent leurs armes, Montagnais et Algonquins constatent qu’ils sont entourés ; que leur chance de fuir est mince. Les deux capitaines se dévouent. Celui de Tadoussac, qui était si fanfaron, a été le premier à découvrir le grand nombre des ennemis. Maintenant, il crie à ses compagnons de fuir. Et, lui, il continue le combat. Enfin, il reçoit une flèche dans la cuisse ; longtemps encore, à genoux, il se défend avec une épée contre ses assaillants ; puis il est tué. Le capitaine des Trois-Rivières n’est pas moins brave. Il ne succombe qu’après un long et violent combat. Mais leur dévouement ne sauve pas tous leurs compatriotes. Un groupe important parvient à fuir, mais quelques uns demeurent prisonniers. Engagé trop profondément, l’un des guerriers continue sa course, s’enfonce plus loin encore dans le pays ennemi. Il se dérobe aux recherches. La nuit venue, il prend la route du retour ; il passe tout près de la bourgade et il entend les cris de ses compagnons soumis au supplice. Il réussit à revenir

  1. RDJ, 1637-79.