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IROQUOISIE

malgré un tison qu’on lui applique aux reins. Les jeunes gens veulent aussitôt attiser le feu autour de lui. Les capitaines ont conservé leur sang-froid et ils s’interposent tout de suite : il faut toujours que le supplicié vive jusqu’à l’aube, sinon c’est un mauvais présage.

Les Hurons étendent le supplicié sur une natte. Ils le laissent en repos. Des feux s’éteignent. La foule s’écoule un peu. Ce n’est qu’au bout d’une heure que le malheureux revient à lui. Il doit recommencer ses chansons. Toute la jeunesse revient et la torture se continue. Les bourreaux n’ont jamais que des paroles de douceur, de bienveillance, de miel. On dirait toujours qu’ils parlent à un ami très cher. Mais leurs actes sont d’une cruauté raffinée. Ils procèdent maintenant avec méthode et lenteur ; ils imaginent des tourments douloureux, mais superficiels. Ils le ligotent, par exemple, avec des cordes ; ils mettent le feu aux cordes qui brûlent peu à peu et le ceinturent de feu ; ils l’obligent à se tenir debout sur des haches rougies ; « Vous eussiez ouï griller sa chair » ; ils lui brisent les doigts encore intacts ; ils le bâtonnent ; ils l’habillent de vieilles nippes auxquelles ils mettent le feu ; les branches embrasées lui caressent continuellement les jambes.

Une assez longue trêve intervient. Des épis de maïs rôtissaient dans les cendres tout à côté des haches. L’Onnontagué mange et boit. Les missionnaires parlent de l’autre vie bien prochaine maintenant ; ils lui donnent les dernières instructions religieuses. Chacun parle, on cause, on tient sur la vie des propos philosophiques. Les Jésuites français disent qu’en leur pays, le supplice du feu n’est infligé qu’aux grands criminels, mais d’une façon prompte et rapide. L’Iroquois raconte la mort de quelques Hurons en son pays aux mains de ses compatriotes.

L’aube répand sa première lueur blafarde. Des feux s’allument alors au dehors du village. Deux Hurons saisissent la victime, l’apportent, la hissent sur un échafaud élevé de sept à huit pieds au-dessus du sol et construit autour d’un arbre ; ils le lient au