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IROQUOISIE

Il chante, il danse autour de la cabane. Le festin a lieu. Puis tous chantent et dansent.

Toute cette foule doit revenir à Arontaen. Les missionnaires expliquent les articles de la foi au condamné, à la multitude, des âmes s’attendrissent : on dirait une page arrachée à la Bible.

Enfin le soleil baisse. C’est l’heure. Les Hurons se rassemblent dans la cabane des Têtes Coupées qui appartient à un fameux chef, Atsan. C’est là que se réunissent les conseils qui débattent les affaires militaires. Les Jésuites se postent auprès du converti pour l’encourager. Vers huit heures les feux s’allument à intervalles réguliers, d’un bout à l’autre de l’habitation ; la distance qui les sépare est d’une brasse. Les vieillards se pressent le long des murs, sur l’échafaud, où les habitants dorment l’été ; les jeunes gens se rangent plus bas, nombreux à s’étouffer. Chacun se prépare un bon tison, une écorce qui s’enflamme bien ; le capitaine encourage chacun à bien faire son devoir ; il faut commencer par les jambes pour que le supplice dure la nuit entière.

L’Onnontagué entre à ce moment. Une clameur l’accueille. Des bourreaux lui lient les mains. Chantant et dansant, il fait un premier tour de la cabane. Puis le capitaine le dépouille de sa robe de castor. Voilà le moment. Le captif commence à faire le tour de la cabane, en marchant ou plutôt en courant. Chacun lui inflige une brûlure au passage. « … Cependant il criait comme une âme damnée, toute la troupe contrefaisait ses cris… ; il fallait être là pour voir une vive image de l’Enfer. Toute la cabane paraissait comme un feu, et au travers de ces flammes, et cette épaisse fumée qui en sortait, ces barbares… hurlant à pleine tête, avec des tisons en mains, les yeux étincelants de rage et de furie, semblaient autant de démons qui ne donnaient aucune trêve à ce pauvre misérable »[1]. On brise au prisonnier les os des mains et des poignets ; on lui perce les oreilles avec des branchettes en feu.

Au septième tour, après qu’on l’a fait asseoir de force sur des braises, le prisonnier ne peut se relever

  1. RDJ 1637-115.