Page:Desrosiers - Iroquoisie, tome 1 (1534-1646), 1947.djvu/146

Cette page a été validée par deux contributeurs.
148
IROQUOISIE

dira la Relation de 1636, avait plus d’autorité que les Capitaines ; même son crédit s’étendait parmi toutes ces nations »[1]. C’est lui qui a négocié le traité de 1634. Il a dû se rendre au pays des Agniers, peut-être aussi chez les Onneyouts et les Hollandais. À son retour, il tient souvent un langage qui étonne les Français. Ainsi, il dit que les Iroquois ont incité les Algonquins « à tuer quelques Hurons, et de prendre guerre avec eux » Pourquoi ? « Les plus avisés croient que c’est une ruse de ceux qui traitent avec ces Peuples, et qui s’efforcent par leur entremise de divertir les Hurons du commerce qu’ils ont avec nos Français ; ce qui arriverait, si nos Montagnais leur faisaient la guerre, et alors ils les attireraient à leurs habitations, d’ s’ensuivrait un très notable détriment pour Messieurs les Associés de la Compagnie de la Nouvelle-France. »[2]

La Grenouille se ferait donc l’instrument des Hollandais. Ceux-ci veulent mettre la main sur les pelleteries que recueille la Huronie. Et le moyen le plus sûr d’atteindre cette fin, serait une guerre entre les Algonquins-Montagnais et les Hurons. Ceux-ci ne pourraient plus passer sur l’Outaouais et le Saint-Laurent dominés par les Algonquins ; ils seraient confinés dans l’intérieur des terres, loin des Océans. Pour disposer de leurs pelleteries, continuer leur commerce, ils devraient s’adresser aux Iroquois qui iraient les revendre à Fort Orange, ou aux Hollandais eux-mêmes. Sans un arrangement de cette sorte, l’existence deviendrait impossible pour eux. Voilà donc le noir dessein que les Français saisissent dans les paroles équivoques de La Grenouille.

Mais quels bénéfices les Algonquins pourraient-ils tirer d’une guerre entre eux et les Hurons ? Ils espèrent affaiblir, détruire ces derniers et s’emparer d’une partie de leur commerce. On sent souvent que les Algonquins de l’île sont prêts à ces extrémités pour supplanter les Hurons et se porter successeurs de leur empire commercial.

La Relation de 1636 fournit des détails supplémentaires sur La Grenouille. Elle affirme que les

  1. RDJ, 1636-33.
  2. Idem, 1635-22.