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IROQUOISIE

peaux de castor. Ils nous assurèrent que les Français donnaient six mains de grains de nacre pour un castor et toutes sortes de choses du même genre. Les sauvages nous entouraient étroitement, nous avions à peine l’espace suffisant pour nous asseoir. S’ils avaient désiré nous molester, nous aurions à peine été capables de nous défendre ; mais il n’y avait pas de danger »[1].

Le lendemain, 31 décembre, le chef de la bourgade et un compagnon reviennent. Et l’auteur ajoute : « Ils nous dirent qu’ils revenaient de chez les sauvages de la France… » c’est-à-dire d’une rencontre, d’un rendez-vous avec les Indiens du Canada, et comme le prouvera la suite de l’histoire, d’un voyage au Canada. Les Hollandais recueillent des renseignements, dressent des cartes, calculent les distances. Ils causent aussi avec leurs hôtes ; ceux-ci leur affirment que sur les hautes terres qui entourent la bourgade « on prenait aussi beaucoup de castors, mais qu’ils n’osaient pas aller si loin à cause des sauvages français ; et qu’en conséquence, ils avaient pensé qu’il était préférable de faire la paix ».

Les visiteurs passent un premier janvier malheureux. La différence entre les prix que les Hollandais donnent et ceux des Français met ces âmes frustes dans une colère qui peut devenir vite sanguinaire. C’est la réaction première de ces hommes de l’âge de pierre. Ils se croient trompés. Ils parlent d’un ton comminatoire. Les Hollandais se tirent de ce mauvais pas avec du sang-froid, de la dextérité, quelques cadeaux. Le soir du même jour, un incident important se déroule. En voici le récit dans le texte original : « Le soir venu, les sauvages suspendirent une bande de grains de nacre, et d’autres objets en grains de nacre que le chef avait rapportés avec lui, qui venaient des Indiens de la France, et qui étaient un symbole à l’effet que la paix existait et que les sauvages de la France pourraient venir en confiance chez eux… » Le chef chante alors certaines paroles. L’auditoire paraît satisfait. « …Et après ceci, ajoute encore Bogaert, une autre bande de grains de nacre

  1. Narratives of New-Netherland, p. 149.