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IROQUOISIE

fatigue », être habitués à s’alimenter de la même façon frugale que les Indiens ; ils porteront des vêtements de cuir et une armure souple, à petites lames d’acier, qui leur tombera jusqu’aux jarrets. Quelques-uns connaîtraient le maniement des pétards de fonte et autres petits canons capables de détruire ou brûler les palissades ou les bourgades iroquoises ; d’autres pourraient construire sur place des appareils de siège comme cavaliers ou mantelets. Ce détachement allié peut se rendre chez les Iroquois en douze jours, et y commencer le siège des villages, « n’y ayant que cinq de leurs villes qui soient de conséquence ». Enfin, les fantassins français se serviraient des armes à feu que les Iroquois redoutent.

Ces extraits forment le testament de Champlain sur le problème iroquois. Ils renferment les conclusions auxquelles il est arrivé après un séjour de trente ans en Nouvelle-France. Champlain n’est pas une tête chaude. Il ne se décide qu’après des considérations appliquées et longues. Il énumère ordinairement les raisons qui l’ont influencé. Mais à ce moment c’est l’expérience, les connaissances de toute une existence, mille facteurs souvent subtils qui le dirigent.

Les idées qu’il exprime ici ne sont pas nouvelles. Champlain a travaillé incessamment à maintenir la paix entre les diverses parties de la Coalition laurentienne, c’est-à-dire entre les ennemis des Iroquois ; il a voulu qu’elles maintiennent un front uni contre l’ennemi commun. L’Iroquoisie les menace gravement dans leur existence, et eux, ils sont les Indiens du Canada, de la Nouvelle-France, c’est-à-dire des sujets, les pourvoyeurs de venaison, de pelleteries, les guides des explorateurs, les néophytes des missionnaires. Les attaques iroquoises portent sur le fleuve Saint-Laurent et l’Outaouais, une distance de quatre cents lieues ; elles visent les tribus qui vivent sur ce long parcours ; elles empêchent les communications de peuple indien à peuple indien, ou de tous ces peuples indiens à la Nouvelle-France ; elles troublent les chasses, elles sont un obstacle au libre transport des