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IROQUOISIE

bourreaux ne s’en départiront qu’au prix de riches présents.

Soudain, des Montagnais arrivent de Québec. Il faut surseoir au supplice : les Algonquins veulent engager des pourparlers de paix avec les Iroquois. Ces Indiens renvoient tout d’abord des prisonniers à cet effet, en les chargeant de présents pour la nation. Si ces ouvertures sont agréées, des négociateurs partent ensuite. Voilà un répit. Mais il est bien court : le deux juillet arrive de Québec la nouvelle que les prisonniers des Algonquins ont subi la torture. L’espoir de paix est mort-né. Les prisonniers de Tadoussac se préparent à la mort. Le père Le Jeune s’adresse à qui veut l’entendre pour les sauver. Il acquittera les frais de leur pension durant leur traversée en mer ; il trouvera en France des personnes charitables pour les recevoir. Il communique son projet au Lieutenant, Monsieur Du Plessis. Celui-ci est fort touché, lui aussi. Et le soir, il oriente la conversation sur ce sujet ; c’est à la table du capitaine ; il faudrait en somme peu d’argent pour racheter les Iroquois ; n’y aurait-il pas lieu même de les réclamer en réparation pour les Français que les Algonquins ont assassinés autrefois ? L’un des convives manifeste une cruauté inouïe : ces ennemis, proclame-t-il, doivent mourir, ce sont de dangereux coquins, il a donné avis à un Indien de Québec de les mettre à mort. Émery de Caën réprouve cette insensibilité. Mais l’affaire en reste là. Le vent est bon le lendemain, les Français partent, laissant ces « trois pauvres abandonnés » entre les mains de bourreaux impitoyables qui en tortureront deux.

Les navires français remontent le fleuve parmi les orages. Les Français trouvent l’habitation brûlée. La messe se célèbre dans la maison des Hébert. Chacun pleure. Le Père Le Jeune questionne le pasteur de la garnison anglaise qui vient de passer six mois en prison parce qu’il est luthérien, que ses chefs sont calvinistes, et que des disputes se sont produites. Les Montagnais, répond cet homme, voulaient négocier la paix avec leurs ennemis par l’intermédiaire des