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dans le nid d’aiglons, la colombe

Seuls les plus perspicaces distinguent ce fait dans la société autour d’eux. Le cas de sainte Thérèse de Lisieux le prouve. Qui était-elle ? D’une certaine façon, en termes d’argot, elle n’était pas une rouspéteuse. Des souliers mal ajustés qui sont une torture ? Pas un mot à la cordonnière. Des robes qui lui donnent la silhouette d’une bossue ? Aucune plainte à la lingère. Des têtes de hareng ou des morceaux presque immangeables sur son assiette ? Elle se tait, Combattant la jalousie en elle-même, une supérieure qui la brime et lui confie des tâches en retenant le titre pour elle-même ? Silence. Une novice lui lance une injure grossière, sûre qu’elle sera dénoncée et fera bondir Thérèse comme sa sainte Mère d’Avila. La cloche sonne. Thérèse sourit, met un doigt sur ses lèvres, embrasse la coupable et ses bras tremblent. Chacune ne voit qu’un aspect minuscule de la religieuse qui devrait reposer à l’infirmerie, mais poursuit ses tâches. Ce n’est qu’après sa mort que ses compagnes se communiquent leurs observations, que les petits événements de cette vie s’agglutinent, que se forme un premier dessin. On découvre les cahiers : ils révèlent l’intérieur de l’âme. Stupéfaites, les Carmélites constatent qu’elles ont vécu avec une sainte sans seulement s’en apercevoir. L’aventure se répète de siècle en siècle ; toutefois les cas extrêmes sont parfois plus voyants et les contemporains les saisissent mieux. Défions-nous des abstractions qui obscurcissent la réalité.

C’est de cette biographie carmélitaine qu’il faut se souvenir en étudiant Jeanne Le Ber, recluse à Ville-Marie pendant trente-quatre ans. Aucun écrit de sa main ou de celle de son confesseur et directeur. Un confrère de celui-ci, un témoin, Monsieur Vachon de Belmont, prêtre de Saint-Sulpice, a rédigé le récit de sa vie. Pour tout humaniste, il est d’une lecture délicieuse. Il se présente sous un titre général d’abord : « Éloge de quelques