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et naît la colombe

peut remplir ces tâches ; et qui, en plus, peut justement apporter la somme qui lui manque. Elle le récompensera ainsi en partie, de toutes les générosités qu’il a eues envers elle. Toute une série d’actes notariés expliquent cette transaction et ne laissent planer aucun doute. À vingt-cinq ans, le 14 octobre 1668, Marie entre au noviciat ; elle revêt l’habit le 14 janvier 1669 ; elle fait profession le 15 octobre 1670, prononçant les trois vœux habituels et y ajoutant celui de dispenser l’enseignement aux petites filles indiennes et blanches. Elle portera le nom de Sœur de l’Annonciation. De son côté, quand il comparaîtra devant les notaires du Châtelet, à Paris, pour confirmer donation, le Montréaliste sera devenu l’« humble Frère Jean de la Vigne, de l’Ordre des Frères de la Charité, au faubourg Saint-Jean des prés, paroisse Saint-Sulpice ». Il semble bien que c’est Marie Le Ber qui ait gagné cette âme à un destin pareil ; qu’elle ait possédé des dons de persuasion particuliers pour l’apostolat ; et qu’ensuite, il faille en tenir compte quand on examine la vie de sa nièce, Jeanne Le Ber.

En plus, il faut considérer un second point : elle subit l’attraction du monastère des Ursulines fondé à Québec en 1639. C’est la grande Marie de l’Incarnation qui en a posé la première pierre et l’a rempli des plus hautes traditions de sainteté. Elle entraîne ses compagnes dans un puissant envol mystique. Elle est encore vivante et occupe toujours, tour à tour, des postes éminents, bien qu’elle soit âgée. Elle écrit ses délicieuses lettres qui rappellent Madame de Sévigné. Elle vit dans une union à Dieu continuelle. Marie Le Ber ne peut ignorer ces faits. C’est dans ces flammes de spiritualité qu’elle veut se brûler. Une foi tiède n’aurait pas voulu ce destin. Et c’est dire que son catholicisme était d’une belle venue, même dynamique, avec une tendance à s’épancher et à se répandre.