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dans le nid d’aiglons, la colombe

Plus tard, en 1710, la Nouvelle-France subit une menace non moins grave. La vocation de Jeanne Le Ber peut être interrompue, sinon détruite. Maintenant, elle est recluse depuis déjà trente ans. Et alors, la foule se tourne vers elle comme vers la personne qui peut lui éviter la destruction. Dans cette situation désespérée, elle demande et veut son intercession. Anne Barroy reçoit ordre « de lui faire connaître le danger imminent où l’on se trouvoit, afin qu’elle le détournat par ses prières ». Sa réputation de sainteté inspire la confiance.

Et parmi les gens qui veulent recourir à elle, s’inscrit en premier lieu son propre cousin, son exécuteur, le baron de Longueuil. Il est le commandant d’un détachement qui doit s’opposer à l’armée ennemie venant par le sud, le lac Champlain, le Richelieu, composée d’Anglais et d’Indiens ; mais ses forces sont tout à fait inférieures en nombre, et, la victoire paraît improbable. Il demande au jeune frère de la recluse qui a cultivé les arts, la peinture surtout, de dessiner sur son étendard la figure de la Sainte Vierge. Sur le même carré de toile, Jeanne acceptera de broder les mots suivants :

« Nos ennemis mettent toute leur confiance dans leurs armes, mais nous mettons la nôtre au nom de la Reine des Anges que nous invoquons. Elle est terrible comme une armée rangée en bataille ; sous sa protection, nous espérons vaincre nos ennemis ».


M. Vachon de Belmont, le premier historien de la recluse, bénit le drapeau « et le mit solennellement entre les mains de M. de Longueuil, dans l’église paroissiale de Notre-Dame, en présence de tout le peuple accouru à un spectacle si édifiant ». Puis des observateurs repèrent la flotte ennemie qui remonte le fleuve.