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ments. Plus tard, « elle adjouta atoutes ses austérités l’usage de la ceinture de fer dela discipline deux fois la semaine ».

Comme le voulait le bienheureux Paul Giustianini, à la Renaissance, elle usa largement des éléments naturels pour s’infliger des pénitences. Ne trouve-t-on pas souvent les Chartreuses sur les montagnes austères, parmi les forêts renfrognées ? Jeanne avait à sa disposition les froids du Canada. Elle s’y livra largement. Les jours d’hiver, pendant de longs mois, elle se levait sans allumer son feu, faisait oraison, partait pour la messe. C’était de l’héroïsme souvent. À la Congrégation, comme le dira Anne Barroy, elle ne chauffait guère son appartement malgré le bois qu’on lui apportait. La nuit, elle entreprenait ses heures d’oraison dans la maison de Nazareth presque abandonnée aux températures terribles du dehors. Pitié pour cette femme émaciée qui passait une heure ou deux à genoux devant l’autel.

Elle refusa d’être, à la Congrégation, la bienfaitrice insigne pour laquelle on a des égards. Au contraire, pour lui donner satisfaction, il fallut « se faire une application a luy donner du Linge le plus gros et le plus usé ». Anne Barroy commit un jour erreur de lui apporter une belle taie d’oreiller. Elle l’en reprit tout de suite ; et « quoy quelle fut d’un naturel très doux elle en fit une sévère reprimande disant que cela étoit tout à fait opposé alesprit de notre seigneur qui s’est fait le plus pauvre des hommes ».
D’autre part, « son lit consistoit à une paillasse quelle ne remuoit jamais afin detre couchée plus durement, un oreiller de paille avec de simples couvertures,