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Que voilà en effet une grande modification des sentiments entretenus depuis quelques semaines ! Mais gare au lendemain ! Un grand conseil s’assemble : les Indiens désirent apprendre de Champlain s’ils recevront l’assistance militaire promise. Champlain écoute les conseils de ses amis, « et cependant de notre part, dit-il, consultâmes ensemble pour résoudre ce que nous avions affaire sur le sujet du meurtre de ces pauvres défunts ». Comme on voit, les deux parties sont absorbées par des préoccupations différentes.

Que sortira-t-il de là ? Champlain commence à parler au milieu de l’imposant conseil : « Je leurs fis réponse, déclare-t-il, que la volonté ne m’avait point changé, ni le courage diminué. Mais ce qui m’empêchait de les assister était, que l’année dernière (1617), lorsque l’occasion et l’opportunité s’en présentait, ils me manquèrent au besoin, d’autant qu’ils m’avaient promis de revenir avec un bon nombre d’hommes de guerre, ce qu’ils ne firent, qui me donna sujet de me retirer sans faire beaucoup d’effet, et que néanmoins il fallait en aviser, mais que, pour le présent », il importe de régler avant tout l’affaire du double assassinat.

Champlain n’a pas plutôt mentionné cette affaire qu’une réaction violente se produit. Le conseil se rompt, les Indiens se fâchent ; ceux-ci admettent l’énormité du crime, ils offrent de mettre les criminels à mort. Cependant, les Français ne songent point à cette forme expéditive de justice. Ils désirent plutôt un procès selon les formes ordinaires ; mais ils s’aperçoivent en même temps qu’il serait prudent de louvoyer, et, pour le moment, ils abandonnent ce sujet.

Comme il le fait souvent dans les moments difficiles, Champlain consulte Pont-Gravé, le représentant principal de la Compagnie dans la Nouvelle-France. Ils étudient ce problème difficile, pèsent le pour et le contre : le pardon peut porter les sauvages à se « licencier », à commettre d’autres crimes, à obéir de nouveau à leurs impulsions, à devenir insolents. Mais