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traitements qu’ils recevaient aux côtes » ; on les privait « de l’usage de choses qui leur avaient toujours été libres… Toute cette navigation s’en allait perdre » ; les revenus des douanes diminuaient, les femmes et les enfants des pauvres pêcheurs seraient contraints de mendier leur subsistance.

Enfin, c’est un tel sabbat que le Roi abolit la Commission. « Les causes principales de la révocation susdite, dit Lescarbot, étaient la cherté des Castors, que l’on attribuait audit sieur de Monts ; item la liberté du commerce ôtée aux sujets du Roi en une terre qu’ils fréquentaient de temps immémorial ». Cependant le seigneur de Monts perd 10.000 livres dans cette entreprise : les habitations de Port-Royal et de l’île Sainte-Croix lui ont coûté cher.

Conseillé par Champlain, le seigneur de Monts obtient, au mois de janvier 1608, une prorogation de son privilège pour une année ; mais cette fois, il abandonne l’Acadie pour le fleuve Saint-Laurent et Port-Royal pour Québec. Il ne vient pas lui-même au Canada, mais ses associés en entreprises coloniales, Champlain et Pont-Gravé, prennent charge de l’expédition.

Pont-Gravé quitte Honfleur pour Tadoussac le 5 avril ; Champlain le suit le 13 du même mois avec les ouvriers et le matériel de la future habitation. Le 3 juin suivant, ce dernier se présente à l’embouchure du Saguenay où il trouve « le Pont-Gravé » dans une bien périlleuse situation. Son camarade a trouvé en arrivant un individu bien peu commode, nommé Darache, commandant d’un navire basque ; en vertu de la Commission détenue par de Monts, il lui a interdit de traiter. Mais l’irascible contrebandier a tout de suite pointé ses canons sur le vaisseau de son adversaire ; il a tiré « force coups de mousquets » ; il a blessé Pont-Gravé, tué l’un de ses hommes, dégarni son navire de toutes les armes. Ensuite, il a juré ses grands dieux qu’il pratiquerait la traite nonobstant toutes les défenses du Roi, et qu’il ne remettrait qu’au moment du départ les canons, les mousquets et les munitions.