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l’étude des langues indiennes

grande disette ». Mais à côté de cette pauvreté, ces langues ont une abondance de noms propres, de verbes absolus, de verbes différents pour exprimer l’action sur une chose animée ou sur une chose inanimée ; elles possèdent « une infinité de mots qui signifient plusieurs mots ensemble ». Enfin, c’est toute une série de difficultés qu’elles posent devant celui qui les apprend sans guide et sans maître.

À l’autre extrémité de la Nouvelle-France alors connue, en Huronie, c’est le père de Brébeuf qui assume, dès 1633, la direction des missions et des études linguistiques. Sur ce dernier sujet, il entretient les mêmes idées que son supérieur, et, de plus, il possède le don des langues. À son retour au Canada, après une absence de trois années, il peut encore haranguer devant les conseils des Hurons. Mais, lui aussi, ne se contente pas de peu.

Au cours de la première Relation huronne qu’il rédige lui-même, voici ce qu’il dit : « Nous nous sommes employés en l’étude de la langue… Les pères Davost et Daniel y ont travaillé par-dessus tout. Ils y savent autant de mots que moi, et peut-être plus. Mais ils n’ont pas encore la pratique pour les former et assembler promptement… Pour moi, qui y fais la leçon à nos Français, si Dieu ne m’assiste extraordinairement, encore me faudra-t-il aller longtemps à l’école des Sauvages : telle est la fécondité de leur langue. Cela n’empêche pas que je n’entende quasi tout ce qu’ils disent, et que je ne leur fasse assez comprendre mes conceptions, même dans l’explication de nos plus ineffables mystères ». Dès le premier hivernement, il réunit les Hurons pour leur enseigner le catéchisme, chanter des prières traduites, écouter des sermons et des instructions. Très régulièrement c’est une routine qui s’établit.

Et les considérations générales abondent en même temps. « Il y a vingt bourgades, qui disent environ trente mille âmes, sous une même langue, et encore assez facile à qui a quelque maître. Elle a distinc-