n’est autre que notre vieil ami Pierre Pastedechouan, dont le nom s’est un peu modifié, mais que les Récollets ont envoyé étudier en France, qui a reçu le baptême à Angers, et dont le parrain fut le prince de Guéméné ; autrefois, le père Le Caron l’a renvoyé à ses compatriotes, car il avait oublié sa langue maternelle après un séjour de cinq ans outre-mer. Maintenant, il sait les deux langues ; entre ses mains, repose une bonne clef du royaume linguistique.
Cependant, ce jeune homme a un peu mal tourné : il est devenu quelque peu sacripant et mauvais sujet, et ne veut point aider les Jésuites. Par bonheur, il mécontente monsieur de Caën à qui il s’est attaché, puis monsieur du Plessis-Bochart. Et sa femme l’abandonne. Rejeté de tous côtés, il ne lui reste plus bientôt d’autre ressource que les missionnaires. Et c’est là que l’attend le père Le Jeune : « Étant donc ainsi rebuté, dit-il, il se vint jetter entre nos bras qui n’étaient que trop ouverts pour lui ; et nous lui procurâmes un habit de Français ». Et sans perdre une minute, on se met au travail, on bûche ferme, on accomplit des progrès : « Je me mets à travailler sans cesse, dit le missionnaire, je fais des conjugaisons, déclinaisons, quelque petite syntaxe, un dictionnaire, avec une peine incroyable ». Et il remercie le ciel : où aurait-il pu trouver un professeur d’égale force ? Car « l’interprète ou truchement nommé Marsolet » refuse toujours de communiquer son savoir au père Le Jeune, comme il a refusé autrefois de le communiquer à Sagard, et pour semblable raison.
Et même avec le professeur, l’entreprise présente des difficultés : « Il m’a fallu, dit le père, avant que de savoir une langue, faire des livres pour l’apprendre, et quoi que je ne les tienne pas si corrects, si est-ce maintenant… que je me fais bien entendre aux Sauvages ». S’il s’est donné toute cette peine, c’est afin d’aboutir à un résultat pratique, la conversion des sauvages, et il se met à l’œuvre sans tarder : « J’ai recueilli, dit-il, et mis en ordre une partie de ce qu’il