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les peuplades barbares ; dans leur zèle, ils tiennent à assurer la continuité de leur travail, et ainsi à faciliter l’instruction de leurs collègues ou de leurs successeurs ; et quelques-uns d’entre eux jouissent de la formation requise pour mettre des manuels à jour, discerner les règles en arrière des mots, réduire les dialectes en écriture. Au contraire de celle des interprètes, leur science ne tend qu’à se communiquer.

En 1615, les Récollets se présentent dans la Nouvelle-France. Ils se plongent tout de suite dans leur travail. Pour étudier des langues, ils doivent imiter les truchements et s’en aller vivre avec les sauvages. Sagard et le père Chrestien Le Clercq fournissent de nombreux renseignements sur ce point.

C’est tout d’abord le père Jean Dolbeau qui part avec les Montagnais, s’enfonce dans la forêt « pour y cabaner, apprendre leur langue, les catéchiser, et courir les bois avec eux ». De son côté, le père Joseph Le Caron suit les Hurons, et lorsqu’il revient au printemps de l’année suivante, en 1616, il a obtenu trois résultats : « connaître les façons de faire de ce peuple, d’apprendre passablement leur langue, et les disposer à une vie plus honnête et civile ». Ce même religieux s’éloigne plus tard avec d’autres compagnons : « Le père Joseph, dit Sagard, qui déjà avait passé une année entière dans le pays des Hurons, désira aussi aller hiverner avec les Montagnais pour apprendre leur langue et les instruire par après en la foi ». Sagard précisera d’une façon plus exacte le but de ces hivernements et de ces voyages lorsqu’il écrira la phrase suivante en parlant du père Piat : « Il voulut se rendre misérable avec les misérables et aller hiverner avec les Montagnais pour apprendre leur langue, car c’est le principal sujet pourquoi on s’y adonne ».

Dès leur venue, les Récollets entreprennent donc résolument leur tâche d’apprendre les langues ; et ils entreprennent dans le même moment la tâche de fixer leurs connaissances sous une forme écrite. De 1615 à 1626, dit-il, ils fréquentent de nombreuses tribus ; ils