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Marguerite



Marguerite avait dix-huit ans. Elle portait encore ses cheveux noirs sur le dos. Sa peau brune et olivâtre ressemblait à celle d’une créole. Le regard de ses yeux brillants glissait de côté sous un large chapeau. Son rire saccadé et nerveux inquiétait et son caractère capricieux avait une violence étrange.

Un soir, Raymond dit à Paul : « Marguerite aimerait à te connaître. » Et le lendemain, il l’emmena chez son amie Rozanne où elle l’attendait. Ils causèrent quelques instants dans le salon où la lumière du crépuscule passait sous un store baissé, comme une mince lame blonde.

Ils sortirent. Pour la première fois il était à côté d’elle et pouvait l’examiner de près. L’excitation et un peu de honte d’avoir fait les premières avances mettaient des taches de rougeur aux joues de Marguerite. C’était le printemps. Il y avait de la boue, en couche épaisse et des flaques d’eau dans les rues de la petite ville. Les saules laissaient pendre une maigre chevelure verte. L’air